Hanneton ou cétoine ? Et si cela n'était pas si simple !?
01/09/2021 |
Faune
« Est ce un hanneton ou une cétoine ? »
Voilà une question que beaucoup se sont posés et se posent encore à la vue de grosses larves blanchâtres, courbées et molles dans leurs composteurs, afin de savoir si elles sont néfastes à leur petite entreprise et souvent avec pour finalité leur destruction, si les informations glanées ça et là orientent l'identification, généralement hasardeuse, vers le hanneton. En effet, la larve de ce dernier est réputée pour se nourrir des racines et donc détruire certaines cultures. Une espèce « nuisible » comme diraient certains...
Il existe bien des moyens mnémotechniques pour distinguer le Hanneton commun (Melolontha melolontha) de la Cétoine dorée (Cetonia aurata) mais la finalité de cet article n'est pas de revenir dessus, Néanmoins, même si la différenciation de leurs larves est aisée, s'arrêter à ces deux seules espèces de la grande famille des Scarabaeidae est une erreur qui peut porter localement atteinte à la biodiversité.
Déjà, comme supposé plus haut, la larve du Hanneton commun n'occupe pas la même niche écologique que celle de la Cétoine dorée. Se nourrissant de racines « vivantes », elle est donc absente des tas de compost mais vit dans le sol. La larve de la Cétoine dorée, quant à elle, est dite saproxylique (du grec ancien « sapros » signifiant -putride- et « xylon » signifiant -bois-). Elle se nourrit du bois mort et intervient donc dans sa décomposition. Elle se rencontre fréquemment dans le compost riche en matière ligneuse, sans nuire d'aucune manière à la qualité de celui-ci. Bien au contraire, elle est même utile au fractionnement d'éléments grossiers. La « bouillie » qui ressort de son tube digestif pourra être « ingurgitée » par d'autres organismes plus petits comme le Ver de fumier. Un vrai travail d'équipe !
Mais où est donc le problème me direz-vous ?
Il est lié à une opposition dichotomique n'ayant pas lieu d'être entre le hanneton et la cétoine (niches écologiques différentes) et ne prenant pas en compte d'autres espèces aux larves dites « mélolonthoïdes » (larves aux caractéristiques communes à celles du hanneton dont le genre est Mélolontha), présentes dans notre région. En effet, de nombreuses larves, notamment de Scarabée rhinocéros (Oryctes nasicornis) et plus rarement de Lucane cerf-volant (Lucanus cervus) sont confondues avec celles du Hanneton commun et sont détruites par ignorance, privant la Nature de magnifiques individus ayant un rôle à jouer dans les écosystèmes forestiers : le recyclage du bois mort. Nos victimes oubliées, le « rhinocéros » européen et le « cerf-volant », ont donc le malheur d'avoir des larves mélolonthoïdes au régime alimentaire saproxylophage.
Une évolution de leurs mœurs est à noter ces dernières années : la colonisation des tas de compost riches en matière ligneuse. A l'instar de la Cétoine dorée, les tas de compost ne sont pour ces deux espèces qu'un biotope venant en substitution, notamment en milieu plus ou moins urbanisé, aux vieilles souches qui sont les gîtes larvaires naturels. Nos composteurs pourraient donc bien leur réussir, à condition que leurs larves, dont la croissance jusqu'à la nymphose (la phase intermédiaire entre le stade larvaire et l'imago) dure plusieurs années, ne soient pas détruites. Il appartient donc à chacun de prendre la mesure de ses actes avant de décider de vie ou de mort pour un être vivant, quel qu'il soit.
• Critères de discrimination des principales larves de la macrofaune du compost et évaluation éventuelle des menaces :
- Cétoine dorée :
Identification : larve blanchâtre, courbée et nettement plus « dodue » à son extrémité postérieure, plus ou moins sombre en fonction du contenu du tube digestif, La larve en fin de cycle peut mesurer jusqu'à 4 cm. Les pattes sont courtes. La tête est petite et de couleur caramel clair.
Statut : espèce non évaluée en région Nouvelle-Aquitaine.
- Scarabée rhinocéros :
Identification : larve mélolonthoïde tirant vers le jaunâtre. Nettement arquée, elle présente une tête rugueuse, massive, de couleur caramel foncé et armée de mandibules puissantes. Les pattes sont plus longues que chez la cétoine. La larve en fin de cycle peut mesurer jusqu'à 6 cm.
Statut : espèce non évaluée en région Nouvelle-Aquitaine.
-Lucane cerf-volant :
Identification : larve mélolonthoïde relativement proche de celle du Scarabée rhinocéros au niveau de sa taille et de sa forme générale. Cependant, sa tête est lisse et de couleur caramel clair. Ses mandibules sont foncées.
Statut : espèce évaluée, inscrite sur la liste rouge européenne des espèces menacées dans la catégorie « NT » (Quasi-menacée) et inscrite sur la première liste rouge des Coléoptères saproxyliques et phytophages du Limousin dans la catégorie « LC » (Préoccupation mineure).
NB : la taille n'est pas un critère de différenciation fiable.
Sources :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Larve_m%C3%A9lolontho%C3%AFde
https://fr.wiktionary.org/wiki/saproxylique
https://insectes-net.fr/oryctes/ory2.html
https://www.insectes-net.fr/lucane/luc3.htm
https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/10502/tab/statut
Sources photo :
Philippe Lebeaux, Descouens, Reporter, Merlier, Flaten, Biks, Pierrard, Compost'Âge.
- Dimitri Delorme, adhérent du RCCNA -