Les coûts de gestion des biodéchets : synthèse des dernières études

09/12/2022 | Ademe Biodéchets Collectivités Communication Compostage domestique Compostage en établissement Compostage individuel Compostage partagé Gestion de proximité Gros producteurs Réglementation
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Plus qu'un an avant la DLCO : date limite de compostage optimal, autrement dit avant la généralisation de l’obligation du tri à la source et de la valorisation des biodéchets.

Mais pourquoi détourner les biodéchets de l’incinération ou de l’enfouissement : question de bon sens (brûler des matières composées principalement d’eau n’est pas très optimal).
Pour l’environnement : moins de camions de collecte des déchets sur les routes, lutte contre la dégradation des sols...
Pour le lien social, notamment dans le cas du compostage collectif.
Il est un autre facteur moins évident de prime abord : le volet économique. Une gestion globale et bien pensée de l’ensemble de nos déchets peut aboutir à des économies ou du moins à limiter l'envolée des coûts.
Historiquement, les biodéchets étant noyés dans les ordures ménagères, il était considéré que le coût de collecte et traitement des biodéchets était celui des ordures ménagères. Nous n'avions que peu de recul sur le coût de la gestion des biodéchets seuls. Depuis quelques mois, la littérature à ce sujet se développe : voici un petit tour d’horizon et des premiers chiffres issus de publications récentes.


1- Coûts de gestion des déchets alimentaires des producteurs non ménagers [ADEME, juin 2022]


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Cette étude établit une première estimation des coûts de gestion des déchets alimentaires des producteurs non ménagers. L’étude présente également des éléments techniques sur les solutions de compostage en établissement et de collecte séparée des déchets alimentaires mises en œuvre par ces producteurs.
Elle distingue aussi les types de producteurs : les quantités « produites » influencent en effet le type de solution mise en œuvre et les coûts associés.


Périmètre et organisation de l’étude :

Les producteurs interrogés sont en France métropolitaine et sont producteurs de déchets alimentaires : restes de repas et restes de préparation de repas. Ils ont été répartis en 6 grandes catégories : les établissements scolaires, de soin, de restauration, touristiques, d’alimentation et les marchés. Il est à noter que la majorité des répondants à l’enquête dont l’étude est issue sont des établissements scolaires, établissements dont la production médiane de déchets alimentaires est ici de 8 tonnes. Les estimations présentées ci-après sont donc plus fiables sur ce type de producteurs que sur les autres catégories.

Les modes de gestion utilisés par les producteurs sont principalement le compostage autonome en établissement et la collecte séparée.

Les coûts ont été séparés en :
Investissement : correspondent à l’achat du matériel (de compostage ou de collecte) et l’accompagnement de la structure ou la formation initiale du personnel. À noter que pour la collecte, les coûts de pré-traitement et les travaux d’aménagement n’ont pas été pris en compte.

Fonctionnement : correspondent au temps moyen alloué par le personnel de l’établissement au tri à la source des déchets alimentaires et à la gestion du site de compostage ainsi qu’aux coûts de location du composteur (le cas échéant).

Pour la partie collecte, les coûts de fonctionnement comprennent les coûts externes (collecte et traitement et dans certains cas location et/ou entretien des contenants), mais aussi les frais de personnel liés au tri des déchets alimentaires (coût interne).

Remarque : l’enquête fait aussi ressortir le coût de gestion des déchets résiduels du panel. Il ressort en moyenne à 205 € la tonne, à comparer avec le référentiel ADEME (2021) qui indique un coût complet moyen de 258 € la tonne.

Voici en infographie les résultats issus de cette enquête.

Etude 1

Les coûts d'investissement pour le compostage en bac sont peu élevés car les composteurs sont souvent fabriqués par les établissements ou mis gratuitement à disposition par la collectivité.
Les coûts de fonctionnement sont beaucoup plus élevés pour la collecte qui génèrent de plus gros volumes à gérer.

Conclusions

Tout d'abord, rappelons que ces chiffres sont une première estimation à partir des producteurs qui ont répondu à l'enquête.

Le coût global varie de 390 € / tonne à 600 € par tonne par an pour le compostage en établissement. En ce qui concerne la collecte séparée, il varie du simple au double selon le type de producteurs : de 630 € / tonne pour les producteurs supérieurs à 10 tonnes / an à 1 210 € / tonne si la masse de biodéchets est inférieure à 5 tonnes.

Parmi les deux solutions de tri à la source étudiées, le compostage en établissement est principalement mis en place par des petits producteurs tandis que la collecte séparée est privilégiée par les gros producteurs. Le seuil de basculement semble se situer autour de 10 tonnes / an, seuil à partir duquel vraiment peu de producteurs pratiquent le compostage.

Globalement, l’évolution des coûts de gestion des déchets dans sa globalité est positive : soit une baisse, soit une absence d’évolution.

En ce qui concerne les moyens humains, d’après les résultats de l’étude, le temps alloué au tri à la source est plus important dans le cas d’une collecte séparée que du compostage : entre 1 à 3 h par semaine pour le compostage en bac ou tas, 3 à 5 h pour les autres modes de compostage et entre 2 à 6 h pour la collecte. Cependant, ce résultat est à mettre en perspective avec la taille de l’établissement puisque les établissements en collecte séparée sont des plus gros producteurs que les établissements pratiquant le compostage.

L’enquête auprès des collecteurs de déchets alimentaires a mis en évidence une forte dispersion des tarifs de collecte pratiqués. Cette variabilité dépend de plusieurs facteurs : modalités de collecte, tonnage collecté, type de prestataire.

Le mode de facturation des déchets résiduels peut être un levier pour la mise en place du tri à la source. En effet, 79 % des répondants étant facturés de manière incitative (en TEOMi ou REOMi) ont mis en place une solution de tri à la source contre 62 % pour les établissements sans facturation incitative (en TEOM ou REOM).

73 % des producteurs pratiquant le tri à la source sont satisfaits aujourd’hui.

Il est intéressant de noter que seuls 6% des établissements ayant reçu une formation et/ou un accompagnement pour le compostage ne pratiquent pas le brassage contre 35% qui n’ont bénéficié d’aucune formation ou accompagnement.

Cette étude évoque aussi le gaspillage alimentaire qui va souvent de pair avec la mise en œuvre du tri à la source et qui impacte les tonnages associés et donc les coûts afférents. Le Cloporteur reviendra dans une prochaine lettre sur le gaspillage alimentaire.

Retrouvez l'étude intégrale sur le site de l'ADEME.


2- Évaluation de la généralisation du tri à la source des biodéchets [ADEME, octobre 2022]


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Une deuxième étude publiée cet automne par l’ADEME : « évaluation de la généralisation du tri à la source des biodéchets » propose un état des lieux complet à un an de l’obligation pour toutes et tous.

Cette enquête, reposant sur les réponses de 232 collectivités, aborde la collecte séparée des biodéchets, la gestion de proximité des biodéchets et formule des recommandations se basant sur les enseignements tirés.

Elle est plus exhaustive que l'étude précédente puisqu'elle aborde le tri à la source dans toutes ses composantes : organisation, impacts globaux sur la gestion des déchets, mesure de son efficacité, etc.

Les éléments économiques ont été décomposés que ce soit pour la collecte séparée ou bien pour le compostage de proximité.

Concernant la collecte séparée, il ressort que les collectivités l'ayant mis en place ont des coûts de gestion globale équivalents à celles qui n'en n’ont pas. L'ADEME rappelle que la collecte des biodéchets engendre bien des coûts nouveaux (notamment au niveau de la collecte qui a un coût supérieur à celle des OMR), mais que ceux-ci sont au moins partiellement compensés par des gains sur les autres flux : gain sur le traitement des OMR, le « boost » sur le geste du tri, l’optimisation des collectes, etc.

Les collectivités ont été interrogées sur le compostage individuel, le compostage partagé et le compostage autonome en établissement, mais le coût du compostage de proximité est difficile à évaluer.
L'ADEME préconise de mettre en place ou consolider cet indicateur.
Remarque : le RCC vient de sortir une étude traitant justement de ces coûts (cf. partie suivante).

L'ADEME met d'ailleurs l'accent - dans ses recommandations - sur l'importance de mettre en place toute une batterie d'indicateurs de suivi du compostage de proximité : évaluation des actions menées, population desservie, population participante, impact sur la part des biodéchets dans les OMR...

En conclusion, il est non seulement difficile d'estimer des coûts notamment sur la partie gestion de proximité, mais il serait aussi délicat de les comparer avec les coûts de la collecte séparée. En effet, en l'état actuel des choses, cette dernière touche plus d'habitants et détourne ainsi des quantités plus importantes de biodéchets.
Dans les autres constats, notons que la mobilisation des collectivités reste encore "timide".

Les 3 recommandations effectuées par l'ADEME sont :
définir un schéma global du tri à la source ;
fixer des objectifs quantitatifs et qualitatifs mesurables ;
mettre des moyens en oeuvre pour définir ce schéma, assurer le suivi et mobiliser élu·es et citoyen·nes.

Retrouvez l'étude intégrale sur le site de l'ADEME.


3- Étude des coûts de compostage partagé parmi 9 collectivités [RCC, novembre 2022]

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Enfin, le RCC vient de sortir une étude de coûts sur le compostage partagé (à destination des ménages vivant en habitat collectif) de 9 collectivités.
À noter que ces collectivités ont en commun d’être fortement - et depuis longtemps – engagées dans le compostage partagé.





L’objectif de cette étude est d’avoir un premier référentiel de coûts pour cette solution. Mais elle va plus loin en analysant ces coûts plus finement.
Ainsi, matériel, broyat, sensibilisation/animation, formation et moyens humains sont décomposés. À noter qu'une analyse encore plus détaillée est faite pour les moyens humains.

Etude 3 - Fig1

Exemple de décomposition des coûts pour la communauté de communes Ambert-Livradois-Forez.

L’ADEME soulignait l’importance de définir des indicateurs de suivi ; le RCC identifie justement toute une batterie d’indicateurs (avec différentes méthodologies détaillées dans l’étude) que les collectivités pourront s’approprier.

Exemple avec l’infographie Toulouse Métropole.

Etude 3 - Fig2


L’étude extériorise aussi différents indicateurs financiers en fonction des critères définis précédemment.

Exemple avec l’infographie Toulouse Métropole (données pour 2021).

Etude 3 - Fig 3


Enfin, l’étude établit un comparatif entre les coûts du compostage partagé sur les collectivités analysées et la collecte séparée des biodéchets (étude ADEME d’octobre 2022 évoquée plus haut).
En moyenne, le coût à la tonne est comparable entre les 2 solutions, alors que le coût par habitant desservi est moindre côté compostage partagé. À noter que la collecte séparée capte une plus grande quantité de biodéchets par habitant desservi, du fait de consignes moins restrictives sur la nature des apports (cuits avec viande, poisson, papiers et cartons souillés, y compris des mouchoirs).

Etude 3 - Fig 4


Conclusions :
Cette étude dédiée au compostage partagé permet de dégager une méthodologie s’appuyant sur des indicateurs concrets.
Elle met aussi l’accent sur des facteurs clés comme l’approvisionnement en broyat, les moyens humains, la compétence des actrices et acteurs.
Enfin, au-delà de l’aspect financier, l’étude rappelle les autres « externalités positives » du fait de « composter ensemble » : le compost produit qui répond à la dégradation des sols, le lien social difficilement quantifiable et le gisement d’emplois non délocalisables.

Retrouvez dans l’étude intégrale du Réseau Compost Citoyen le détail des 9 collectivités étudiées avec leur méthodologie, leur particularité et les conclusions propres à chacune.


Conclusion :


Voici donc quelques éléments de coûts et performances qui concernent quelques solutions de tri à la source des biodéchets. Ces premiers chiffres sont évidemment amenés à évoluer avec le déploiement massif de diverses solutions dans un avenir proche, mais ils ont le mérite de donner quelques références sur lesquelles s’appuyer.
Il ne s’agit pas non plus de comparer tel ou tel type de solution avec un prisme uniquement financier : toutes les études le soulignent, c’est un mix de solutions qui émergera en fonction de la typologie de l’habitat, de la densité de population, etc.

Notons enfin une chose qui est ressorti à plusieurs reprises dans ces études : la tarification incitative est un levier efficace de réductions des ordures ménagères.